Agents Cancérogènes, Mutagènes ou toxiques pour la Reproduction (CMR) : Traçabilité de l’Exposition des Travailleurs
Avec l’entrée en vigueur du décret n° 2024-307 du 4 avril 2024, un nouveau cadre de traçabilité s’impose aux employeurs concernant l’exposition des travailleurs aux agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR). Désormais, les entreprises doivent établir une liste nominative de leurs travailleurs potentiellement exposés à ces substances dangereuses, avec une application obligatoire au 5 juillet 2024
L'ESSENTIEL A RETENIR
L’objectif de ce décret est clair : améliorer la sécurité et la santé au travail en renforçant la traçabilité des expositions aux substances CMR, tout en informant mieux les travailleurs et leurs représentants. Mais que contient exactement cette nouvelle obligation, et comment la mettre en œuvre efficacement
LES NOUVELLES OBLIGATIONS DES EMPLOYEURS
Chaque employeur doit dresser une liste actualisée des travailleurs exposés à des agents CMR. Cette liste doit préciser, pour chaque personne concernée :
- Les substances auxquelles ils sont exposés ;
- La nature, la durée, et le degré de cette exposition, lorsque ces informations sont disponibles.
C’est une démarche importante non seulement pour garantir la transparence au sein de l’entreprise, mais aussi pour s’assurer que les services de santé au travail disposent de toutes les informations nécessaires pour protéger la santé des travailleurs, y compris sur le long terme. En effet, cette liste devra être conservée pendant au moins 40 ans après la fin de l’exposition.
TRANSPARENCE ET ACCES AUX INFORMATIONS
Les travailleurs ont le droit d’accéder aux informations qui les concernent directement. Pour les membres du comité social et économique (CSE), une version anonymisée de cette liste sera mise à disposition. L’employeur devra aussi transmettre ces données aux services de prévention et de santé au travail (SPST) pour qu’elles soient intégrées dans le dossier médical en santé au travail (DMST) de chaque travailleur.
Important : cette obligation ne concerne pas uniquement les salariés permanents. Les entreprises utilisatrices de travailleurs temporaires sont aussi tenues d’informer les entreprises de travail temporaire pour qu’elles transmettent les données à leurs propres services de santé.
LA CLE : UNE MEILLEURE TRAÇABILITE DES EXPOSITIONS
Cette nouvelle mesure vise à combler les lacunes du passé en matière de prévention et de suivi des expositions professionnelles. Elle permet une gestion plus rigoureuse des risques liés aux substances CMR, notamment grâce à l’utilisation d’outils déjà existants comme le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP). Ce dernier consigne les dangers identifiés dans l’entreprise et est une source clé pour compléter la liste des travailleurs exposés.
S’APPUYER SUR LES DISPOSITIFS ACTUELS
Pour les employeurs, pas besoin de tout réinventer. Plusieurs dispositifs déjà en place peuvent servir de base pour constituer cette liste :
- L’évaluation des risques réalisée dans le cadre du DUERP, qui doit être régulièrement mise à jour.
- Les mesurages des valeurs limites d’exposition professionnelle (VLEP), ainsi que les rapports de contrôle technique.
- Le suivi individuel renforcé, qui offre un cadre pour identifier les travailleurs exposés à des agents CMR et leur apporter une surveillance médicale adaptée.
L’employeur peut aussi bénéficier de l’appui des SPST pour s’assurer que les informations sont à jour et correctement documentées.
CMR dans le BTPVERS UNE MEILLEURE PROTECTION DES TRAVAILLEURS
Cette initiative fait partie d’une démarche plus large de protection des travailleurs contre les risques chimiques. En renforçant la traçabilité des expositions aux agents CMR, elle permet de mieux informer, protéger et suivre la santé des personnes concernées sur le long terme.
Pour les employeurs, il s’agit aussi d’un signal fort : la sécurité des salariés et la prévention des risques professionnels sont au cœur de leurs responsabilités. Une bonne traçabilité des expositions n’est pas seulement une obligation légale, mais aussi un levier pour assurer un environnement de travail plus sain et plus sûr.
En résumé
le décret n° 2024-307 introduit une démarche proactive et structurée pour la traçabilité des expositions aux agents CMR. Employeurs, travailleurs et services de santé sont désormais mieux équipés pour identifier, prévenir et gérer ces risques avec une approche plus durable et complète.
Les chiffres clés des CMR en France
11 % de la population active déclare être exposé à au moins un CMR
1,27 millions de tonnes d’agents chimiques cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction qui ont été exportées depuis la France
2,147 millions de tonnes de CMR ont été importées en France
554 CMR classés 1A et 1B sont identifiés dans la base de données de l’INRS